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Le secteur du software en Chine

  • Administrateur
  • il y a 2 jours
  • 4 min de lecture

Panorama général : un marché encore caché derrière les géants d’Internet


Le logiciel d’entreprise (« enterprise software ») est longtemps resté l’angle mort de la tech chinoise, dominée médiatiquement par l’e-commerce et les super-apps grand public.Dans ce vaste ensemble, le marché SaaS “pur” représente encore « seulement » 25,9 Md USD (2024) mais affiche un CAGR attendu de 15 % jusqu’en 2030


Les dynamiques clés sont :

  • La digitalisation accélérée des PME et des collectivités (post-Covid, politique “cloud-first”),

  • Le mandat de substitution nationale (“xinchuang”) qui impose aux administrations de remplacer les logiciels occidentaux par des solutions locales

  • La montée rapide de l’IA générative, intégrée dans les suites bureautiques, les ERP et les plateformes low-code.


Cartographie des sous-segments et principaux acteurs



Ces entreprises se partagent un écosystème où les grands clouds (Alibaba, Tencent, Huawei, Baidu) servent à la fois de partenaires (IaaS) et de concurrents (leurs propres suites SaaS : DingTalk, WeCom, Feishu).


Performances financières et indicateurs clés



Les multiples élevés reflètent deux paris : la substitution souveraine (ERP/office domestiques) et l’intégration accélérée de l’IA générative.


Forces structurelles


  • Taille du marché domestique Avec ~ 7 M d’entreprises actives et plus de 1 000 organes publics de niveau provincial et supérieur, la Chine offre un terrain naturel pour le SaaS et les ERP « local compliant ».

  • Politiques de “sinisation” / xinchuang La circulaire MIIT–MOF impose aux administrations d’atteindre ≥ 70 % de parts de logiciels, OS et bases de données nationaux d’ici 2027 The Takshashila InstitutionFinancial Times.

  • Intégration avec les clouds nationaux Alibaba Cloud, Huawei Cloud ou Tencent Cloud subventionnent l’onboarding de solutions ISV, abaissant la barrière d’entrée pour les PME.

  • Adoption rapide de l’IA WPS AI, DingTalk AI Agent, Feishu « Dolphin » et Kingdee GPT integrés en 2024 démocratisent la génération de contenu et l’automatisation des process, créant de l’upsell sur les versions payantes NasdaqAInvest.


Faiblesses et défis


  • Fragmentation de l’offre : Des centaines d’éditeurs sectoriels se partagent des niches étroites, rendant le marché extrêmement atomisé. Cette dispersion comprime les prix et complique l’émergence d’un leader généraliste dépassant 500 M USD de chiffre d’affaires annuel.

  • Rentabilité fragile : Hormis Kingsoft Office, la plupart des acteurs affichent encore des marges nettes inférieures à 5 %. La migration vers le SaaS alourdit simultanément les coûts d’infrastructures et de R&D, retardant l’expansion du free-cash-flow.

  • Dépendance au budget public : Les programmes de « sinisation » dopent la demande mais exposent les éditeurs à la santé financière de l’État. Un gel budgétaire ou un allongement des délais de paiement pourrait brutalement freiner la croissance et tendre le besoin en fonds de roulement.

  • R&D très capital-intensive : Les pure-players d’IA investissent plus de 60 % de leurs revenus dans la recherche pour rester compétitifs et souverains. Cette dépense massive retarde la génération de trésorerie et entraîne un risque accru de dilution pour les actionnaires.


Opportunités d’investissement


  • Cloud ERP pour les SOE et collectivités – Kingdee et Yonyou déploient des packages “Government Cloud COSMIC/YonBIP” standardisés ; chaque province lance son tender, générant une pipeline pluriannuelle de centaines de M RMB.

  • IA générative appliquée – Kingsoft Office (WPS AI) vend déjà des bundles premium ; la base installée > 600 M d’utilisateurs crée un levier “freemium → subscription”.

  • Export Asie-PAC – WPS Office, Kingdee (Asie du Sud-Est) et Feishu (Japon, Singapour) gagnent des comptes light-ERP ou collaboration chez les start-ups, vivant de leur position “cost-efficient + AI-ready”.

  • Consolidation sectorielle – l’exigence d’intégration verticale (cloud + SaaS + AI) pourrait pousser Alibaba Cloud, Baidu ou Tencent à acquérir des éditeurs moyens pour étoffer leurs marketplaces et sécuriser la conformité “xinchuang”. Les small-caps (ERP verticaux, cybersécurité) deviennent alors des cibles.


Risques majeurs


  • Régulation des données – la loi sur la cybersécurité et la PIPL exigent localisation et audits, ce qui alourdit les coûts de conformité et limite l’export de SaaS.

  • Pressions concurrentielles des géants – Alibaba, Tencent et Huawei subventionnent agressivement leurs propres suites ; un éditeur tiers peut perdre un marché si un cloud impose un bundle maison.

  • Économie domestique atone – La consommation ralentit ; nombre de PME reportent leurs projets IT en période d’incertitude, freinant les licences et l’usage payant.

  • Sur-dépendance au financement public – Les programmes de substitution offrent subventions et contrats, mais un changement budgétaire (priorité réallouée à la défense ou à l’immobilier) réduirait la demande.

  • Valorisations étirées – PER > 100× pour certains titres AI (iFlytek, Cambricon) supposent une conversion rapide du pipeline en profits, ce qui reste incertain.


Tendances 2025-2027 à surveiller


  • Normalisation des LLM “ouverts” – Baidu ouvre Ernie 4.5, Huawei open-source Pangu. L’écosystème software devra être compatible multi-LLM ; les éditeurs ayant un SDK agnostique (Kingsoft, Kingdee) auront un avantage.

  • Edge-cloud convergence – Les ERP et MES industriels s’exécutent de plus en plus « on-prem & edge » pour satisfaire la souveraineté des données. Cela profite aux fournisseurs de plateformes hybrides (Huawei Cloud Stack, Sangfor).

  • Normes nationales de cybersécurité – Un draft publié en 2025 établit un label “Class II secure software”. Les éditeurs certifiés devraient bénéficier d’un quasi-monopole dans le secteur financier et gouvernemental.

  • Internationalisation prudente – Après la percée de TikTok, Shein et Temu, Pékin encourage la globalisation des “soft-infra” : Feishu en ASEAN, WPS Office en Afrique, Yonyou au Moyen-Orient. Les barrières linguistiques et de confiance (sécurité des données) demeurent, mais la compétitivité-prix et les fonctions IA peuvent compenser.


Conclusion pour l’investisseur


Le software chinois n’a pas (encore) accouché d’un Salesforce ou d’un Adobe mondial, mais il est entré dans une phase de rattrapage rapide :

  • Demande captive : la politique de souveraineté numérique garantit un socle de revenus, surtout dans le secteur public.

  • Innovations IA intégrées : les suites bureautiques et ERP locales adoptent plus vite les assistants IA que nombre d’équivalents occidentaux, dynamisant l’ARPU.

  • Relais de croissance externe : la saturation du marché domestique pousse DingTalk, Feishu ou WPS à s’exporter vers l’Asie, l’Afrique, l’Amérique latine.


Le profil risque/rendement varie fortement : Kingsoft Office ou Kingdee offrent un mix croissance-rentabilité plus “classique”, alors que SenseTime ou Cambricon restent des valeurs “moonshot” extrêmement sensibles aux commandes publiques et à la guerre technologique sino-américaine.


Pour se positionner, un investisseur peut combiner :

  • Core holdings : Kingsoft Office, Kingdee – play sur le SaaS souverain haut de gamme ;

  • Satellites IA : SenseTime, iFlytek – upside sur la GénAI mais flux de trésorerie incertains ;

  • Plates-formes cloud : Alibaba Cloud (via BABA) et Tencent – exposition indirecte à l’essor SaaS via leur marketplace ISV ;

  • Small caps verticales : Sangfor (cyber), Inspur (hyperconvergence), Ming Yuan (property SaaS) – jeux ciblés sur la consolidation.


Le secteur reste haute conviction, haute volatilité : la maîtrise des politiques de “sinisation”, l’évolution du cadre de sécurité des données, et la vitesse de monétisation de l’IA seront les vecteurs essentiels de performance entre 2025 et 2030.

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